Les origines historiques du human flag

Pour beaucoup, le Human Flag — ou drapeau humain en français — c’est la figure même qui évoque le Calisthenics, symbole de la maîtrise de son corps. Et même ceux qui ne connaissent pas la discipline associent spontanément le human flag à cette esprit de maîtrise du corps.

À première vue, tout laisse à penser que cette figure serait apparue dans les années 2000, popularisée par l’émergence du Street Workout. Il suffit de revoir certaines vidéos cultes, comme celles des Ruff Ryders, pour constater à quel point ces images ont participé à façonner l’imaginaire collectif autour du Calisthenics et du Human Flag.

Mais si on creuse un peu, on découvre que ce mouvement, que l’on croit récent, est en réalité bien plus ancien.

Un héritage des arts du spectacle (XXe)

Le premier réflexe que l’on pourrait avoir serait de chercher des traces du Human Flag dans les manuels de gymnastique moderne des XIXᵉ et XXᵉ siècles. Après tout, une grande partie des mouvements du Calisthenics s’inspire directement des performances gymniques, comme les muscle-ups, les tractions ou les dips.

Pourtant, on ne trouve aucune mention du Human Flag dans ces écrits. Et pour cause : cette figure n’est pas issue de la gymnastique académique, mais plutôt des arts du spectacle.

En effet, avant de devenir un symbole du Calisthenics moderne, le Human Flag était déjà pratiqué comme acrobatie dans les troupes de cirque. À l’époque, on ne parlait pas encore de flag, mais plutôt de figure à la perche (ou perch pole en anglais). C’est d’ailleurs de ce type de travail sur perche qu’est née plus tard la discipline du pole dance.

Les précurseurs occidentaux (XIXe siècle) (XIXe)

Les figures à la perche restaient toutefois rares en Occident. On trouve quelques archives dès les années 1830, notamment avec Edward Klischnigg, surnommé “Joko le singe brésilien”. Mime animalier et contorsionniste, il se produisait déguisé en singe et réalisait des figures spectaculaires, mélangeant force et souplesse.

Certaines de ses positions rappellent un Human Flag improvisé, qu’on appelait alors position flottante libre. Des illustrations le montrent accroché à des branches ou des troncs, tenant une position horizontale — certes encore approximative et peu gainée.

À la fin du XIXᵉ siècle, ces figures se développent aussi grâce à des artistes de cirque comme Louis Soullier, directeur français dont les tournées l’emmènent jusqu’en Asie, notamment au Japon en 1871. C’est au cours de ces voyages qu’il découvre les spectacles locaux, et qu’il s’inspire des acrobaties japonaises sur perche pour enrichir et diversifier son répertoire.

Jeux équestres de Soullier. En haut de l’image on peut apercevoir 2 acrobates réaliser des sortes de drapeau humain. (© Domaine publique)

L’époque Edo : l’âge d’or des acrobaties japonaises (XVIIe – XIXe)

Lors de ses tournées, Louis Soullier découvre une forme d’acrobatie japonaise pratiquée sur perche, connue sous le nom de Kyokuzashi. Ce numéro s’inspirait des performances spectaculaires des bateleurs de l’époque Edo (1615–1868), une période où les arts itinérants et les démonstrations d’équilibre connaissaient un véritable essor au Japon.

Ces artistes étaient passés maîtres dans l’art des équilibres sur perches ou échelles, qu’elles soient posées au sol, portées par un partenaire ou directement plantées dans le décor. Les foires et festivals locaux offraient alors un terrain idéal pour ces démonstrations, où force, technique et esthétique se rejoignaient. Ces numéros combinaient agilité, force et sens du spectacle, fascinant les foules par leur audace et leur créativité.

Mais ces traditions japonaises semblent elles-mêmes trouver leur origine ailleurs…

Rouleau peint à l’encre et couleurs sur papier présentant une troupe d’acrobates réalisant des prouesses spectaculaires sur des perches et supports, un art venu de Chine et popularisé au Japon à l’époque Edo (environ 1800). © Domaine public.

La Chine, berceau des acrobaties sur perche (dynasties Song et Han)

Le human flag nous vient donc de Chine, où ses racines plongent profondément dans l’histoire. Cette discipline remonte tout d’abord à la dynastie Song (960–1279), période durant laquelle les artistes utilisaient déjà de longues perches en bambou pour exécuter des figures spectaculaires. Ces prouesses ne se limitaient pas à un simple divertissement : elles incarnaient une forte dimension symbolique et culturelle. La perche représentait un lien entre la terre et le ciel, un moyen d’exprimer l’élévation physique et spirituelle, tout en testant l’équilibre et la maîtrise de soi.

Mais cette tradition puise en réalité ses origines encore plus loin. Bien avant la dynastie Song, des témoignages d’acrobaties verticales apparaissent dès la dynastie Han (206 av. J.-C. – 220 apr. J.-C.). À cette époque, grimpe et prendre de la hauteur n’étaient pas des gestes anodins : il s’agissait d’un réflexe vital pour observer les alentours, anticiper un danger ou récolter des ressources. Ces mouvements d’ascension, nés d’un besoin de survie, ont progressivement été transformés en véritables performances artistiques.

Des pétroglyphes retrouvés dans des tombes à Chengdu (Chine), illustraient déjà des acrobates utilisant des supports verticaux, comme des bambous. Cette pratique est aussi mentionnée dans la Théorie des 100 Divertissements attribuée à l’empereur Wu Di (rédigée en 108 av. J.-C.), l’un des premiers textes à décrire ce type de prouesses. Ainsi, ce qui était d’abord un acte instinctif et utilitaire est devenu peu à peu une forme d’art spectaculaire et un symbole de maîtrise du corps à travers toute l’Asie.

Peinture murale de la dynastie Song, découverte dans le comté de Dunhuang (province du Gansu). Cette fresque illustre la tradition chinoise des acrobaties sur perche, où un jeune artiste réalise des figures spectaculaires en hauteur, symbole de maîtrise du corps et d’agilité. © Domaine public.

Pour aller plus loin

Explorer les racines du Human Flag, c’est réaliser que ce mouvement iconique va bien au-delà d’une simple prouesse de force. Il porte en lui un héritage culturel et symbolique riche, transmis de génération en génération, et transformé par des artistes à travers les siècles.

Aujourd’hui, il reste un exercice et un défi pour tous ceux qui veulent se dépasser, tester de nouvelles façon de s’entraîner et faire preuve de créativité, tout en cultivant un certain sens esthétique dans leur pratique. Car c’est ça la mentalité du Calisthenics. Ainsi si toi aussi tu souhaites approfondir ta pratique du Calisthenics, améliorer ta technique sur les mouvements ou découvrir des programmes complets adaptés à ton niveau, tu peux retrouver toutes les ressources et les programmes disponibles sur le site de la Muscle-Up Academy.

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Tu peux également retrouver la vidéo retraçant les origines du human flag sur la chaîne YouTube de la Muscle-up Academy ainsi que les sources sur lesquels s’appuie cet article :

▶️ https://www.youtube.com/watch?v=QhxewsE0g

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